La galerie du Cierge est une galerie où il n’y a pas d’art pariétal. Pourtant, elle dévoile de nombreuses informations lorsqu’on se met à porter le regard sur les roches, les parois et les sols.
L’art de regarder est crucial dans la recherche à Chauvet. Cela résulte des décisions prises pour conserver ce lieu intact et pour n’interférer en rien dans les traces ou les objets, datant du Paléolithique. Que reste-t-il si l’on ne peut pas toucher, ni marcher sur les sols, ni fouiller ? Il faut s’assoir et regarder, affûter le regard et déployer les visions, qu’elles soient oculaires ou intellectuelles, apprendre à prendre le temps.
Jean-Jacques Delannoy a développé cette pratique dans sa recherche en géomorphologie. Il s’est efforcé d’inclure ses observations dans l’espace et le temps relatif (cela s’est passé avant, ceci s’est passé après) et d’explorer les liens possibles des humains du passé avec leur environnement. Ceci s’avère efficace car la grotte, ses pierres, ses formes, ses concrétions ont enregistré la mémoire du vivant : ainsi, le géomorphologue va pouvoir déduire de ses observations des gestes et des aménagements humains.
Dans la galerie du Cierge, les humains du Paléolithique ont créé des retenues d’eau en construisant des barrages de pierre et d’argile. Ils ont aussi cassé un plancher stalagmitique, puis déplacé le bloc obtenu pour créer une marche afin de passer plus facilement une zone de grand dénivelé.
C’est alors que le relief souterrain décrit et répertorié par un scientifique expert des reliefs karstiques et des grottes devient un paysage. Il est le résultat de la transformation par l’homme de son environnement et de son interaction avec lui.